mardi 1 juin 2010

Les leçons d'un assaut

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Sur la dernière tragédie israélo-palestinienne, j'adhère à l'analyse équilibrée de Bernard Guetta ("Géopolitique", sur France Inter). Je la recopie ici (c'est moi qui surligne en gras), en préalable à des prises de positions plus personnelles.
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Eugène LEPOITTEVIN - Bataille navale remportée par Briandra sur la flotte ottomane en 1346 (1841)
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Il y a, d’abord, les évidences, accablantes pour Israël. Organisé dans les eaux internationales, cet arraisonnement était totalement illégal et doit, donc, être considéré comme un acte de piraterie dont les conséquences relèvent de la seule responsabilité de son organisateur. En droit, les passagers de cette flottille étaient fondés à se défendre et, quand bien même auraient-ils initié les violences – ce qui est possible, voire probable, mais reste à prouver – la première de ces violences était l’arraisonnement.
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Cela doit être dit mais, lorsqu’on a dit cela, on n’a dit qu’une partie de la vérité car cette flottille n’avait pas que des objectifs humanitaires. Il s’agissait, oui, d’apporter une aide aux habitants de Gaza, objets d’un blocus économique depuis bientôt trois ans, mais cet objectif n’était que secondaire par rapport à l’ambition fondamentale de cette opération qui était de placer Israël devant une alternative dont il ne pouvait que sortir perdant. Ou bien il laissait ces bateaux accoster à Gaza et c’en était fini de ce blocus, brisé dans ce qui aurait été une victoire politique des islamistes, ou bien son armée les bloquait par la force, au risque évident de ce qui s’est produit hier matin, de ces nombreuses victimes dont la mort fait peser sur Israël le poids d’un opprobre international.
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Parce qu’elle ne lui laissait pas de bonne solution, cette opération a totalement piégé Israël mais fait-elle, pour autant, de lui, au-delà de ses responsabilités, une victime politique ? Oui mais, là encore, ce n’est qu’une partie de la vérité car rien n’obligeait Israël à organiser ce blocus de Gaza, lui-même illégal au regard du droit international et qu’il n’était pas illégitime de vouloir forcer.
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Tout se plaide dans cette affaire. Aucune des deux parties ne manque d’arguments et c’est au fond qu’il faut aller pour en juger. Le fond, c’est qu’Israël ne s’était retiré de Gaza en 2005, au bout de 38 ans d’occupation, que pour voir le Hamas en chasser le Fatah par la force après avoir remporté les élections législatives palestiniennes de 2006. Tandis que cette bande de terre devenait une plate-forme de tir contre son territoire, Israël a, en conséquence, décidé d’en organiser le siège. Ni rien ni personne ne peut plus en sortir ni y entrer sans son autorisation. Gaza a été transformé en prison à ciel ouvert avec, pour objectif, parfaitement clair, d’amener les Gazaouis à se révolter contre le Hamas, à désavouer les islamistes et à renverser leur pouvoir.
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Cet objectif n'est pas qu'israélien. A l’autre frontière terrestre de Gaza, l’Egypte participe à ce blocus, tout aussi activement qu’Israël, car elle craint qu’une victoire politique des islamistes en Palestine ne précipite leur victoire sur son propre territoire et dans l’ensemble du monde arabe. Depuis trois ans, le siège de Gaza n’est qu’un élément de la vaste partie régionale qui oppose Israël et les régimes arabes, d’un côté, à l’Iran, au Hamas et au Hezbollah libanais, de l’autre. En ce sens, ce blocus a sa logique mais, outre qu’il consiste à prendre une population en otage, il ne mène à rien d’autre qu’à l’impasse pour Israël qui ne trouvera sa sécurité que dans la justice et la raison – celles de la création d’un Etat palestinien.

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